Le château d’Hérouville

Entre 1969 et 1985, à Hérouville-en-Vexin, en France dans le département du Val-d'Oise, se trouve un endroit qui a peut-être été primordial pour la plupart des artistes musicaux de l’époque. C’est ce que je vais essayer de vous raconter…

 

 

 

 

 

Hérouville a été un lieu de résidence de plusieurs familles de comtes et de princes à partir de la moitié du 16ème siècle… Mais l’endroit qui nous intéresse, lui, à été construit mi- 18ème, en 1740 sur les ruines de l’ancien château…
Au 19ème siècle il servait de relais des postes entre Versailles et Beauvais. Il s’y trouvait une spectaculaire écurie pouvant héberger une centaine de chevaux. Il appartenait au maire de l’époque, le Baron et Comte « Achille Louis de Brisay ». Le château fut vendu 6 ans après la mort de celui-ci en partie démoli. Le château fut un lieu de rencontres et de villégiature pour « Frédéric Chopin » et « George Sand ». Il servit de décor en 1829 dans une scène de chasse, et son histoire est racontée dans « Modeste Mignon d'Honoré de Balzac »…


 

Mais, l’histoire du château qui nous intéresse, elle, commence en 1962… Le compositeur « Michel Magne » cherche un endroit tranquille pour travailler. Il achète le château avec son ami « Jean-Claude Dragomir » pour y habiter avec sa famille et y aménage une salle de musique dans l’aile Nord avec piano à queue, orgue électronique, instruments divers, et de quoi travailler pour ses assistants (entre autres, « Jean-Claude Vannier », « Jean-Claude Petit », « Karl-Heinz Schäfer », « Éric Demarsan » et « Michel Colombier »...). En 1965, « Michel Magne » devient le propriétaire de la totalité du château suite au décès de son ami...

En mai 1969, Toute l’aile Nord du château et la salle de musique sont ravagée par un incendie accidentel. « Michel Magne » fait alors transformer les combles de l'aile Sud en studio d'enregistrement. Les frais engagés sont énorme. Il décide donc de créer un société commerciale pour rentabiliser ces frais…

Michel Magne dans le studio de l'aile Sud du château d'Hérouville

 

Le 18 novembre 1969 nait la « SEMM » (Société d’Enregistrement Michel Magne) pour exploiter ce studio de 100 m² et 6 mètres de hauteur de plafond. Ce studio baptisé « Strawberry Studio » est le premier en France et le deuxième dans le monde à proposer aux artistes l’hébergement et de pouvoir se restaurer directement sur place… Ce qui ne manque pas de satisfaire sa clientèle car Hérouville est assez loin de Paris…

 

Publicité de 1973 parue dans la presse anglo-saxonne.

 

De 1971 à 1973, les enregistrements tournent à plein régime. Le studio est occupé 20 heures sur 24. Les ingénieurs du son sont « Dominique Blanc-Francard » et « Andy Scott » assistés par « Gilles Sallé ». Le succès du studio dépasse les frontières et sa renommée à l’international est faite. La liste des artistes qui y sont passé est énorme, tant par les artistes français que par les anglo-saxons. Avec un tel succès, en plus du studio, « Michel Magne » crée un studio mobil de 16 pistes dans un camion Ford qui devient le « Studio Stawberry Mobil »…

 

 

Mi-1972, « Michel Magne » est fatigué de devoir gérer le studio et d’être le patron de la société d’enregistrement et décide de se remettre à la composition de musique de films et cède à « Yves Chamberland » le propriétaire du « Studio Davout » pour le franc symbolique la « SEMM » mais reste le propriétaire du château…

 

« Chamberland » gère le studio de manière plus rigoureuse avec un réaménagement technique. L’accueil y est moins familial et certains artistes se plaignent de la monotonie du menu. Jugé par David Bowie comme répétitif recevant trop de patates et de lapin. Le succès descend et les finances vont de plus en plus mal.  Après 6 mois et un déficit de 1,2 million de francs, il jette l’éponge, lance des procédures judiciaires et récupère son matériel…
Pendant l’hiver 1973-74, « Jean-Pierre Ezan » et « Claude Harper » maintiennent une activité de moins en moins chargée dans le studio et le parc du château est laissé à l’abandon.

 

Après le départ de « Chamberland », les lieux sont loués à la société de « Laurent Thibault » qui a réglé une grande partie des dettes de la « SEMM » en 8 ans. Et les murs de l’endroit sont vendus aux enchères à la société « Service Terrains » qui projette de transformer le parc (17000 m²) en lotissements, la cour et les granges en centre hippique… Ce projet est contré par « Laurent Thibault » qui entre temps a fait classer une grande partie des infrastructures du château. Et la mairie refusera toutes les demandes de permis de battir…

 

Après 12 ans d’occupation « Laurent Thibault », après commandement, quitte les lieux. Le propriétaire occupe le 1er étage de la grange avec un magasin de sellerie et fourniture pour chevaux et loue l’aile Nord et son annexe découpées en appartements… En 2001, la société « Arkamis » loue l’aile Sud encouragée par le Conseil régional du Val d'Oise. Seul le chanteur « Jean-Louis Aubert » viendra travailler avec ses musiciens pendant quelques mois pour son album « Idéal Standard » et fin 2005 le château est à nouveau vide… Il sera officiellement mis en vente en juin 2013 pour 1,29 million d’euros…

 

En janvier 2015, le château est racheté par un collectif composé de deux ingénieurs du son et d'un financier dans l'audiovisuel (« Jean Taxis », « Thierry Garacino » et « Stéphane Marchi »). Un projet de réhabilitation des studios voit le jour et en juin le château est ouvert aux villageois. 40 d’entre eux participent au nettoyage du parc. En novembre le Studio Chopin se voit accueillir un centre de formation audio. Le studio historique est réaménagé et un autre studio est créé dans les anciens appartements de « Michel Magne »…

 

Le château réouvre ses portes comme studio d’enregistrement en 2016. Plusieurs sessions d'enregistrements live sont tournées pour la chaine Arte : « Gregory Porter », « Metronomy », « Sting », « Melody Gardot »…

Gregory Porter.                                                                                          Metronomy.                                                                                            Sting. 

 

Melody Gardot

 

Ne s'étant jamais remis de la perte de son château en ayant perdu son procès, « Michel Magne » se suicide à Cergy dans une chambre d'hôtel le 19 décembre 1984 à 54 ans, quelques jours après sa convocation du jugement au tribunal de Pontoise…


Je vous invite à consulter les deux ouvrages suivant...

 

 

 

 

 

 

 

"Hérouville, le Château hanté du Rock" de "Laurent Jaoui" paru dans la collection "Castor Music" chez "Le Castor Astral"...

 

 

 

 

 

 

 

 

"Les Amants d'Hérouville" (une histoire vraie). Bande dessinée de "Yann Le Quellec" et "Thomas Cadène" parue chez "Delcourt"...


Quelques artistes ayant enregistrés au Château d'Hérouville...


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